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La mise en boussole du questionnaire est une phase décisive des ateliers. C’est un outil qui permet de se représenter spatialement la situation où l’on est. Il permet aussi une forme théâtralisation de nos réflexions ainsi qu’une interaction riche entre les participants.
L’exercice consiste à organiser les réponses au questionnaire en les disposant au sein de quartiers d’un grand cercle dessiné au sol.
Les éléments représentés sont hétérogènes et relatifs aux réponses particulières au questionnaire : ce peut être des êtres, des choses, des institutions, des pratiques ou des comportements. Nous les appelons « éléments ou entités » pour simplifier.
La boussole permet de naviguer dans le réseau d’attachements et de dépendances, de les hiérarchiser, de visualiser, spatialiser et connecter ses dépendances, de mettre en mots ses attachements, de les exprimer le plus clairement possible pour que cela soit compris par l’audience. Vous retrouvez en annexe plusieurs dessins de boussoles.
La boussole est un dispositif tracé au sol. Elle peut être réalisée avec des rubans adhésifs ou des bouts de corde attachés au sol. Son diamètre varie entre de 5 à 7 mètres, mais vous devrez bien évidemment adapter sa grandeur aux dimensions du local. Les chaises sont disposées tout autour pour l’accueil des participants. Le cadre de l’assemblée est posé.
Il y a plusieurs façons d’animer la boussole. Après plusieurs expériences, nous en proposons une, légèrement différente de celle utilisée au sein du projet pilote à Saint-Junien par le Consortium Où atterrir.
La personne dont on réalisera la boussole se place au point d’entrée, entre les premiers quarts de celle-ci.
Dans une première phase, cette personne lit et raconte son auto-description : à chaque fois qu’elle mentionne un élément, elle le représente par un papier mentionnant l’être évoqué et le dispose au sol. Ceci exige donc que la personne ait bien préparé sa présentation.

L’entité qu’elle sent en danger et ce qui pourrait contribuer à favoriser l’existence de cette entité menacée sont placés dans le premier quart à droite. Ce qui menace l’entité choisie comme en danger et empêche les actions sont placés dans l’autre quart, à gauche.
Tous les éléments considérés par la personne comme positifs et contrant la menace seront placés à sa droite. Tous les éléments considérés comme négatifs et menaçant seront placés à sa gauche.
On les appelle les polarités positives et négatives.
Pour déterminer si un élément est positif ou négatif, on se demande s’il engendre une suite, un futur, s’il déclenche d’autres bénéfices ou bien au contraire s’il ferme des possibilités, s’il stérilise un futur.
La personne dispose les éléments plus ou moins loin du centre de la boussole suivant l’action qu’elle peut avoir sur ceux-ci. Tout proche, une influence est possible, éloigné, l’action de la personne est difficile ou impossible. La personne place donc les éléments en fonction de sa capacité à avoir prise ou non sur eux. Ceci est important pour la suite : cela permet de discriminer le proche et le lointain, non pas en termes de local ou de global mais selon si c’est « avec prise » ou « sans prise ». Il s’agit de distribuer les éléments afin de saisir ceux qui seront potentiellement des leviers d’action (ceux avec prise).
Pendant cette phase, il est demandé aux autres participants et participants de ne pas critiquer, de ne pas donner leur avis. On peut cependant poser des questions d’éclaircissement.
Quand la personne aura lu l’entièreté de son texte et disposé près d’elle les éléments de sa description, d’autres participants seront convoqués pour représenter les entités dans l’espace de la boussole.
Une conversation entre la personne et les éléments et entre ceux-ci commence. Chacun présente son identité, nourrit celle-ci, lui donne de l’épaisseur et se situe par rapport aux autres.

La phase suivante consiste, pour la personne présentant sa boussole, à avancer jusqu’au centre et de ce point, d’énoncer les engagements et actions qu’elle mènera pour préserver, prendre soin des éléments qu’elle a considéré en danger. Et à ce moment, comme l’écrit Bruno Latour, « chacun tremble un peu : il faut se décider, c’est là le plus difficile, on se révèle : on va parler de soi, ou mieux, de ce qui vous fait vivre ». La personne place dans le quart supérieur droit les actions envisagées ou en cours et dans le quart gauche, les entités qu’elle perçoit comme ennemies ou adversaires à ce qu’elle veut réaliser.
De même, dans un premier temps, les autres participants écoutent, mais peuvent poser des questions d’éclaircissement. Quand la personne a terminé sa présentation, à nouveau aussi, les autres personnes viennent représenter, donner identité et vie aux éléments évoqués. Il s’en suit à nouveau une conversation entre les éléments.

Ces deux phases peuvent s’enchainer ou être vécue à des moments différents. Un moment d’enquête peut sembler indispensable entre la première phase et la seconde. Mais cette enquête doit aussi précéder et suivre la boussole. En effet, de multiples questions se posent, nous devrons chercher des renseignements, des données, des faits, des réactions d’identités nommées, des positionnements que nous ne connaissons pas.

Durant les cycles, nous invitons plusieurs personnes à présenter leur boussole. Nous avons pu préparer préliminairement une boussole avec une personne, afin que la première boussole soit bien exemplative de la démarche. D’autres fois, ce sont les personnes les plus motivées qui choisissent de partager leur travail.
Suivant la durée du cycle et le nombre de séances que l’on peut y consacrer, plusieurs personnes pourront présenter devant et avec tout le groupe. Pour les autres, nous demandons de préparer un document représentant graphiquement leur travail, avec le plus de détails possibles. Des boussoles « vierges » sont mises à disposition et peuvent servir de support, sans obligation.
Une séance sera alors consacrée à l’amélioration de cette représentation en sous-groupes de trois. Si l’une présente, les deux autres écoutent, posent des questions, sont au service pour clarifier et « épaissir » la présentation.
Puis chaque personne présentera son dessin, sa boussole et prendra un temps pour l’expliquer aux autres participantes et participants.

+ Un exemple de boussole

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