Un vallon fertile en ce terroir marseillais aride



Autour du ruisseau, au Moyen-Âge, les espaces sont cultures de blé et de vignes. Une cinquantaine de sources ont été recensées aux Aygalades en préalable aux travaux pour creuser la galerie à la mer (galerie de 17 km en ligne droite sous la chaîne de l'Etoile de Gardanne au cap Pinède et qui passe sous le terril d'alumine de l'avenue Ibrahim Ali pour évacuer les eaux de la mine de bauxite à Gardanne, XIXème siècle). Ce sont elles qui abreuvent le territoire souterrain comme en surface et des voix d'irrigation sont également mises en place par les métayers qui cultivent les terrains des propriétés. Car dès le XVème siècle, les riches marseillais placent leur argent dans la terre et l'agriculture et ils seront de plus en plus nombreux à faire construire une bastide sur leur propriété, une maison de campagne. D'abord d'origine seigneuriale, pour les plus anciennes et les plus imposantes, comme celle du Comte de Castellane où se trouve actuellement l'établissement EPIDE entre la Cité des Arts de la Rue et les 4 chemins, ces propriétés ont été démultipliées depuis le XVIIème siècle par la bourgeoisie locale, modelant ainsi l’image du terroir marseillais, du «terradou». Les transactions s'effectuent, d'abord, avec les différents ordres monastiques à une époque à laquelle église et Etat sont profondément imbriqués.

Une double page extraite de "Le livre du ruisseau" écrit par Christine Breton décrit la propriété rurale autour du ruisseau qui englobait l'actuel quartier d'Arenc avec la zone industrielle Arnavant, le marché aux puces et le parc Billoux situé au 246 de la rue de Lyon à côté du métro Capitaine Gèze soit une superficie de 20 hectares:

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Dans le quartier des Aygalades, cinq bastides dominent les espaces à la fin du XVIIIème siècle. Ce sont des havres de verdure et de fraîcheur isolés au milieu d'un terroir désséché. Composés de multiples bosquets et d'espaces d'ombre à l'abri des canicules estivales, les familles opulentes de Marseille se réfugiaient dès les premières chaleurs, emportant avec elles meubles et domestiques, loin de la puanteur du port, de l'atmosphère populacière des quais et des ruelles, des maladies flottant dans l'air de la ville.
Ces maisons de campagne devinrent peu à peu un lieu de séjour estival pour la bourgeoisie d'en ville et ses hôtes, un refuge en cas d'épidémie ou de trouble urbain et elles cessèrent de n'avoir qu'une fonction agricole.
Les cartes postales et les photos du début du XXème siècle pointent l'objectif sur des excursionnistes endimanchés les pieds dans l'eau tout près des chutes de cette cascade.
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Excursionnistes aux pieds de la cascade du Roy René




Le quartier des Aygalades devient réputé pour sa beauté notamment grâce à son ruisseau hors du commun qui plonge régulièrement en cascades. L'une d'entre elles surgit et émeut sur la terrasse de l'hôtel «Le châlet», au centre du village.
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Cascade de l'Hôtel le Châlet aux Aygalades

Les jardins des châteaux et bastides mettent en scène l'eau très présente dans ce repli du territoire. Un art de la vision pour créer de véritables paysages d'eau et de reflets. Cascades au travers desquelles scintille le soleil, lacs et bassins comme des miroirs offrant aux spectateurs une seconde nature. Sur les bords de la terrasse du château du Roy René, des fontaines, véritables œuvres d'art baroques affichent le luxe suprême dans un territoire qui manque globalement d'eau. Ces réflexions aquatiques au milieu des bastides qui rivalisaient de colonnades, de statues, de balustrades, de fers forgés, de lambris de tapisseries contrastaient avec les bâtiments austères et dépouillés désormais construits en centre ville. Au XVIIIème siècle, les négociants répugnaient à dépenser leur argent en ville car la dépense ostentatoire n'est plus de mise chez les riches marseillais, désormais sur leur quant-à-soi. L'embellissement des bastides au XVIIIème répondait à cette évolution des moeurs. La bastide permettait une consommation de l'art purement privée, loin de la rue: dans ces villégiatures où l'on se retrouvait en bonne compagnie, il était permis de donner à voir une opulence dont l'étalage, devant la ville entière, eût semblé dépacé, et même vulgaire. *

*Texte issu tel quel ou revisité et adapté du livre Histoire universelle de Marseille, Alessi dell'Umbria

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Bassin du château de Montléric
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Cascade du château du Comte de Castellane
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Une source, château du Roy René
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Cascade du château Castellane/ Estournel

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    Le ruisseau des Aygalades longeant la bastide de la Guilhermy
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    Le ruisseau des Aygalades à la bastide de la Guilhermy
    Le ruisseau Caravelle dans son lit naturel longeant la bastide de la Guillermy. Il a été depuis dévié et canalisé dans un chenal en béton de sorte à longer l'autoroute nord. Cette bastide est encore visible et vient d'être rénovée.