Viol : le sondage de la honte / Bègue, Laurent. Cerveau & psycho n°114, octobre 2019, pp. 66-70

Type de ressource : Livre, revue
Description de la resource : Pour presque un Français sur deux, une femme violée y est un peu pour quelque chose. L’occasion de comprendre comment le cerveau humain peut croire n’importe quoi.
Au mois de juin, un sondage réalisé par Ipsos et l’association Mémoire traumatique et victimologie révélait que pour 42 % des Français, la responsabilité de l’agresseur est atténuée si sa victime a eu une attitude « provocante ». Le fameux argument de la jupe trop courte, donc… et celui-ci n’a pas de limite : jusqu’où iront, à ce petit jeu, les circonstances atténuantes d’un passage à l’acte ? Un regard aguicheur ? Des talons trop hauts ? Des cils trop longs ? Ou, le cas échéant, une culotte de dimensions insuffisantes : en 2018 en Irlande, l’avocate d’un violeur a plaidé la cause de son client en arguant que la victime portait un string. Il a été acquitté, sans que l’on sache exactement quel poids a eu l’argument de la tenue légère…
Selon l’Organisation mondiale de la santé, plus d’une femme sur 10 dans le monde subit un rapport sexuel forcé au cours de sa vie. En France, c’est une femme sur 6 et un homme sur 20 qui déclarent avoir subi un jour un viol ou une tentative. Pour ces victimes, les conséquences physiques, psychologiques et sexuelles sont considérables. En dépit de ces dommages, nombre d’entre elles s’abstiennent de demander du soutien ou de porter plainte (moins de 40 %, selon United Nations Women, en 2018), minimisant au contraire la gravité de l’épisode de violence qu’elles ont subi, le considérant comme une affaire personnelle, ou ne souhaitant pas confronter l’agresseur à la justice.
La victimisation secondaire
Les recherches menées depuis près d’un demi-siècle sur le viol se sont essentiellement attachées à décrire ses contextes matériels et relationnels et plus largement à identifier ses représentations erronées, à la fois dans le grand public et auprès des professionnels du travail social et de la justice. Ces « mythes » en matière de viol non seulement produisent une distorsion dans la perception du phénomène, ce qui est préjudiciable à sa prévention et son traitement, mais également amplifient les dommages psychologiques et sociaux subis par les victimes elles-mêmes (ce que l’on appelle la victimisation secondaire). En effet, ils contribuent à rendre les victimes (presque toujours des femmes) responsables de leur sort en introduisant...
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